Dans tout le Nigéria, des entreprises mettent en place des programmes d'allaitement et de soutien à l'allaitement maternel sur le lieu de travail, grâce à un plaidoyer soutenu par Alive & Thrive, qui, selon les militants de la cause, fait également évoluer les mentalités à plusieurs niveaux.

"On a beaucoup sensibilisé, beaucoup travaillé sur l'importance de soutenir l'allaitement aternel sur le lieu de travail", a déclaré Funmilayo Arowoogun, présidente du réseau des femmes chefs d'entreprise de la Nigeria Employers' Consultative Association’s (NECA). "Nous avons mené un plaidoyer agressif auprès des employeurs du secteur privé. De plus en plus de gens adhèrent à l'idée, même le gouvernement."

Une étude d’Alive & Thrive publiée en 2019 a fourni des données probantes qui ont impulsé le plaidoyer, mais au cours des derniers mois, un programme qui a introduit deux crèches pilotes - au bureau principal de la NECA et à l'hôpital universitaire de l'État de Lagos - a incité les entreprises à intervenir pour soutenir l'allaitement.

Le programme pilote a également conduit à la rédaction de la boîte à outils du programme de soutien à l'allaitement maternel et à la lactation sur le lieu de travail.

Les crèches pilotes ont été créées avec le soutien technique et financier d'Alive & Thrive. Elles ont montré aux entreprises - la NECA compte plus de 3.000 membres répartis dans tout le pays - ce qui était possible, et un certain nombre d'entreprises ont depuis créé leurs propres crèches.

"Au début, une grande entreprise de la place ne voulait pas le faire", a déclaré Arowoogun. "Mais quand ils ont vu la crèche, ils nous ont appelés et ont dit de leur envoyer quelqu'un pour les guider".

La même chose s'est produite avec la propre crèche de la NECA, a-t-elle poursuivi, qui a obtenu le soutien du Directeur général de la NECA après qu’il ait assisté au lancement de la crèche pilote à l'université d'État de Lagos.

"Lorsqu'il a vu l'enthousiasme et comment les femmes étaient si heureuses d'avoir quelque chose comme ça, il m'a appelé ce jour-là et m'a dit que nous devrions commencer la nôtre immédiatement", a déclaré Arowoogun. "Rien ne s’est fait avant qu'il voie la crèche".

Kemi Adenuga, qui travaille au bureau d'accueil de la NECA, a déclaré qu'elle avait accueilli favorablement cette innovation. Sa fille de 7 mois, Michelle, est une habituée de la crèche.

"Je peux aller à la crèche pour allaiter à tout moment - j'adore ça", a déclaré Adenuga. "Cela facilite mon travail. J'ai l'esprit tranquille. Je peux voir mon bébé à tout moment."

Cela signifie également que Michelle a beaucoup plus de chances d'être exclusivement nourrie au sein pendant les six premiers mois recommandés de sa vie, a-t-elle ajouté, ce qui n'a pas été le cas pour le frère aîné de Michelle, qui a maintenant 6 ans.

"J'ai dû utiliser du lait maternisé parce qu'à mon précédent lieu d’emploi, il n'y avait pas de crèche et je n'avais pas assez de temps pour pomper mon lait", se souvient Adenuga. "Il n'y avait pas de crèche à proximité de mon lieu de travail; je devais alors laisser mon bébé aus soins de ma mère".

Les crèches pilotes font partie d'un effort de sensibilisation à plusieurs volets, a expliqué Toyin Adewale-Gabriel, conseiller principal en matière de politique et de plaidoyer d'Alive & Thrive au Nigéria.

Les crèches pilotes n'ont pas seulement montré ce qui était possible, dit-elle - elles ont inspiré la création du Programme de Soutien à l'Allaitement et à la Lactation sur le lieu de travail au Nigéria, une boîte à outils pratique qui guide les entreprises dans l'adoption de politiques et d'installations favorables à l'allaitement. Le programme a été diffusé officiellement lors de la célébration de la Semaine mondiale de l'allaitement maternel en août de cette année.

"Vous entendiez beaucoup d'objections – "Cela va coûter trop cher' ou 'Comment pouvez-vous amener des bébés sur le lieu de travail ?", raconte Adewale-Gabriel. "Mais les attitudes sont en train de changer".

Arowoogun est d’accord.

"Le paradigme a changé", déclare-t-elle. "Il y a quelques années, cela n'existait pas. Maintenant, les gens sont plus réceptifs, plus disposés à écouter ce qui peut être fait. Le gouvernement soutient pleinement l’initiative - cela a changé toute la question."

Céline Oni, Directrice de l'apprentissage, du développement et des projets à la NECA, a déclaré que les changements reflètent le fait que de plus en plus d'entreprises comprennent que pour attirer - et retenir - les femmes, elles doivent faire plus qu'offrir des salaires attrayants.

"Si vous voulez retenir des personnes de talent, vous devez mettre en valeur votre propre talent ", dit-elle. "Ce qui concerne une employée devrait concerner l'organisation".

"Certaines personnes démissionneront pour des raisons de famille", poursuit-elle en se rappelant ses propres expériences professionnelles antérieures. "Pour que vous puissiez retenir votre personnel, vous devez examiner les avantages que vous lui offrez. Lorsque les employés ne sont pas soutenus, ils partent."

La preuve la plus récente de l'évolution des mentalités est le commencement du congé de paternité de 14 jours ouvrables pour les fonctionnaires fédéraux. Mais Mme Oni dit qu'il faut faire davantage.

Les croyances culturelles selon lesquelles les femmes n'ont pas leur place au lieu de travail sont "encore répandues", a-t-elle déclaré, en particulier dans les régions les plus conservatrices du pays.

"Mais davantage de femmes commencent à s'exprimer; elles comprennent les préjugés et les inégalités", dit-elle. "Elles choisissent de s'exprimer pour que leurs talents ne soient pas occultés. Et elles aident d'autres femmes également."

Le rapport d'Alive & Thrive sur les droits liés à la maternité, publié en 2019, a fourni des données probantes qui sont maintenant à l'origine de nouvelles actions de plaidoyer.

Le rapport est basé sur une enquête nationale sur les droits liés à la maternité, menée conjointement par le Ministère fédéral de la Santé du Nigéria, l'UNICEF et Alive & Thrive. Il a montré que seulement 9% des organisations interrogées avaient une politique d'allaitement sur le lieu de travail. En outre, ces politiques n'étaient pas cohérentes d'un État ou d'un secteur à l'autre : seuls 1,5 % des organisations du secteur public et 23 % des organisations du secteur privé proposaient des crèches ou des services de garderie sur le lieu de travail.

Suite à la publication de ce rapport, Alive & Thrive a soutenu la révision des National Guidelines on Baby Friendly Initiatives au Nigéria. Les nouvelles directives comprennent désormais le soutien à l’allaitement sur le lieu de travail, ce qui a fait de l’allaitement sur le lieu de travail une question importante pour les décideurs politiques, les chefs d'entreprise, les femmes employées et autres.

"On constate un intérêt et des efforts croissants pour adopter des politiques favorables à la famille sur le lieu de travail", a déclaré Mme Adewale-Gabriel. "Auparavant, dans certains secteurs, il était difficile pour une femme de conserver son emploi lorsqu’elle était enceinte. S'il fallait procéder à des licenciements, les femmes en congé de maternité étaient les premières à partir. Dans certains secteurs, il y avait une règle non écrite selon laquelle il fallait travailler un an avant de tomber enceinte."

Mais le temps des protections de la maternité - soutien à l'allaitement sur le lieu de travail, congé de maternité de six mois et autres - est arrivé.

"De nombreuses entreprises du secteur privé commencent à adopter des politiques favorables à la famille - elles veulent conserver leurs employées seniors", a déclaré Mme Adewale-Gabriel. Il est également bon que le gouvernement se soit rallié à la nouvelle politique de congé de paternité et qu'il ait inclus l'allaitement sur le lieu de travail dans les directives "amies des bébés".

"Je pense que tout le monde reconnaît que les femmes peuvent avoir leur carrière et aussi donner à leurs bébés le meilleur départ dans la vie."